19 Juillet 2023
Martigny (Suisse) - Exposition
Fondation Pierre Gianadda
Jusqu'au 21 janvier 2024
« Les Années Fauves », la nouvelle position de la Fondation Gianadda à Martigny (Suisse), illumine ses cimaises avec des œuvres aux couleurs flamboyantes. Organisée en partenariat avec le Musée d’Art moderne de Paris, elle se penche sur la période des années 1905 à 1908 pendant laquelle s’est développé à Paris le Fauvisme, un mouvement fulgurant et éphémère, à l’importance considérable, qui a « enflammé » la peinture. Matisse, Manguin, Derain, Vlaminck, Rouault, Braque, Marquet, Dufy, Braque, Van Dongen, Picasso occasionnellement, Othon Friesz, Jean Puy, et quelques autres, ont porté la couleur à son paroxysme en la laissant s’exprimer en toute liberté. Plus expressive que descriptive, cette technique nouvelle a cherché à saisir les sensations plutôt que la réalité.
Au début du XXème siècle, la scène artistique parisienne est très vivante, aussi c’est dans ce creuset riche en avant-gardes qu’une génération d’artiste décide de peindre autrement. Malheureusement le succès n’est pas là car dès ses premières apparitions, cette peinture scandalise le public, qualifiée avec moquerie de « Fauve » par le critique Louis Vaucelles. Ses formes simplifiées, ses couleurs pures et agressives et son interprétation fantaisiste de la réalité n’ont pas été comprises. En fait, sans être vraiment une école, le Fauvisme n’accepte ni les règles, ni les manifestes et encore moins les interdits, car il veut avant tout réagir à l’Impressionnisme et au divisionnisme, ce qui a fait réagir les habitués des Salons.
Peintres de paysages, de nus et de portraits, mais aussi céramistes de talent, les artistes "fauves" aiment décrire sur le vif les berges de la Seine et les villages de Chatou, d’Argenteuil ainsi que la Normandie, mais aussi les scènes de ville aux rues pavoisées, les cabarets de Montmartre et les cirques : Rouault peint des filles et des ivrognes, Picasso et Van Dongen des prostituées et des saltimbanques, Vlaminck surtout des paysages, Van Dongen ainsi que Vlaminck se tournent vers la céramique, dans un chromatisme agressif. Tous construisent maintenant leurs tableaux avec la couleur qu’ils posent en aplats cernés de noirs, en supprimant le modelé des visages et des corps ainsi que les ombres qu’ils évoquent par des contrastes colorés : le tableau devient alors une surface totalement éclairée. Les formes sont stylisées, la touche est animée et la palette très vive est souvent dissonante car elle fait se confronter les couleurs complémentaires.
L’exposition réunit une centaine d’œuvres : de nombreuses peintures, quelques sculptures, des œuvres graphiques et des céramiques, accompagnées d’un petit ensemble de statuaires africaines remarquables.
Commençons la visite par la partie circulaire du grand hall de la Fondation où la plupart des œuvres sont exposées. Elles sont regroupées par thèmes sans suivre l’ordre chronologique puisqu’elles ont été réalisées entre 1904 et 1910. Tout d’abord ce sont les paysages (Raoul Dufy : Les Régates, HST 1907-08), puis l’atelier, le modèle et le corps ( Kees Van Dongen : Nu à la corbeille de fleurs, HST 1908), les saltimbanques et le cirque
( Henri Manguin : Les Bohémiens, HST 1904), les figures (Henri Manguin : La Femme à la Grappe, HST 1905) et les baigneuses (André Derain : Baigneuses, HST 1908) et enfin les céramiques (André Derain : « Vase tube à décor de trois nudités assises » 1906.
Le parcours terminé, les visiteurs restent éblouis par cet art embrasé dont l’esthétique révolutionnaire a ouvert la voie à la modernité.
Brigitte Roussey