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BlablaARTS - Brigitte Roussey

Expositions - Beaux-Arts

"Le Joueur de luth" de Caravage

Commentaire artistique

1°version,1595-96. Musée de l'Ermitage à St Pétersbourg

 

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2° version, 1596-97. Metropolitan museum of New York

Michelangelo Meresi dit le Caravage (1571-1610) est très vite attiré par la peinture. Il suit une formation artistique à Milan avant de partir pour Rome en 1592 pour chercher fortune. La vie là-bas est dure pour les artistes et Caravage y mène une existence misérable jusqu’à ce qu’il soit remarqué par le Cardinal Del Monte, un prélat passionné d’art et de musique, mécène et grand collectionneur, qui le prend à son service. C’est auprès de lui que Caravage peindra ses trois premiers chefs-d’œuvre suite à la commande du cardinal pour un travail sur le thème de la musique, très à la mode à Rome à cette époque. Ce sera le « Joueur de luth » dont l’artiste exécutera 2 versions authentifiées, une troisième conservée en Angleterre étant sans doute une copie. L’autre tableau, le « concert » 1595, est à rapprocher des deux autres tableaux car il y met en scène un groupe de jeunes gens dont un joueur de luth.

Le Concert - 1595

 

Le Joueur de luth 1° version - St Pétersbourg

La première version peinte vers 1595-96, est achetée par le marquis Vicenzo Giustiniani. Elle est conservée au Musée de l’Ermitage à Saint-Pétersbourg. La deuxième version, 1596-97, un peu plus grande, a été gardée par le Cardinal Del Monte dans ses collections. Le tableau sera vendu par les héritiers du cardinal à la famille Barberini en 1627-28. Il est en dépôt au Metropolitan Museum of Arts de New-York. Cette version a été longtemps considérée comme une copie réalisée par le peintre Carlo Magnone, avant d’être confirmée de la main du Caravage.

Le Joueur de luth. 2° version - New York

Ces deux tableaux sont des œuvres de jeunesse, aussi relève-t-on quelques points caractéristiques de cette période que l’on ne retrouve pas dans les œuvres postérieures : leurs dimensions modestes ; les deux figures juvéniles représentées à mi-corps, qui se détachent sur un fond neutre ; il n’y a pas de profondeur dans la construction car les instruments de musique créent la troisième dimension. La toile de l’Ermitage témoigne avec ses ombres tempérées, d’une influence vénitienne presque Georgionesque tandis que le tableau américain est peint avec plus de fougue, dans un style plus contrasté qui amorce le nouveau processus consistant à accentuer les ombres.

 

Détail du joueur de luth de Saint pétersbourg

Un jeune garçon d’une beauté androgyne, aux cheveux bruns bouclés, chantonne en s’accompagnant de son luth. Il porte une chemise blanche largement ouverte dont les manches sont retroussées. Très voisines, les deux versions comportent cependant quelques différences : La carafe, les effets de lumière et les magnifiques natures mortes présents dans la première ont disparus dans la deuxième, remplacés par une épinette et une flûte.

Détail du Joueur de Saint Pétersbourg

Les partitions de musique qui ont été identifiées sont différentes. Mais l’on note pour chaque tableau la même construction en oblique et le même rayon de lumière qui éclaire les épaules de l’adolescent.

 

Comme toujours Caravage fait appel dans ses deux versions à de nombreuses références iconographiques : La nature morte, traditionnellement liée au thème de la vanité, ou le nouveau pouvoir de la musique pour exprimer les passions humaines ; la musique jouée symbolisant la vie éternelle, et l’androgynie du modèle qui rappelle les relations homosexuelles du cardinal Del Monte avec le peintre ; les fleurs qui transmettent un message amoureux appuyé par le luth accompagnant la romance. Les quatre sens sont aussi illustrés : les fleurs pour l’odorat, les fruits pour le gout et le toucher et les instruments de musique pour l’ouïe, les lèvres entrouvertes de l’adolescent accentuant sa sensualité.

 

détail du bouquet. Musée de l'Ermitage.

En comparant les deux versions de ce tableau, nous pouvons suivre l’évolution du style du Caravage, meilleur dans celle de New-York, notamment dans le traitement des ombres et des contrastes.

Deux peintures exceptionnelles au charme certain, troublantes même par la sensualité et l’érotisme qu’elles dégagent.

 

Brigitte Roussey

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