9 Juin 2023
Lyon - Exposition
Musée des Beaux-Arts
Jusqu'au 27 aout 2023
La nouvelle exposition du Musée des Beaux-Arts de Lyon : Robert Guinan, Chicago, en marge du rêve américain, honore le peintre américain Robert Guinan (1934-2016). Elle est organisée autour d’un tableau magnifique de l’artiste : Portrait de Nellie Breda 1973, acheté par le musée à la galerie lyonnaise Le Lutrin en 1977. Les visiteurs découvriront avec intérêt une importante sélection de peintures et de dessins complétée par deux séries de lithographies sur le thème de l’esclavage, d’une part, et les poèmes de guerre du grand poète pacifiste anglais Wilfred Owen d’autre part.
Robert Guinan est né à Watertown, une petite ville située au nord de l’état de New-York. En 1959, après avoir servi, militaire, pendant la guerre de Corée, il arrive à Chicago pour étudier l’histoire de l’art, la peinture et la photographie. C’est dans cette ville trépidante qu’il rencontre le pianiste noir Émile Breda, qui lui fait découvrir les bas-fonds de Chicago, ses bars, ses filles de joie et ses quartiers malfamés. Il aborde alors l’expressionnisme abstrait et le Pop Art qui domine la scène artistique américaine. À partir des années 70 il peint essentiellement les déshérités des quartiers pauvres de Chicago, dans un style qui n’est pas sans évoquer ses mentors Henri de Toulouse-Lautrec et Edgar Degas.
Robert Guinan est peu connu du public américain car ses compatriotes jugent sa peinture décalée par rapport à celle d’autres artistes américains dont le succès dépasse les frontières. La France découvre son travail en 1973 lors de sa première exposition à Paris, à la galerie Loeb. Malheureusement il est très peu représenté dans les collections publiques et son œuvre est restée en marge du rêve américain.
Ses sujets sont puisés dans les mauvais quartiers de Chicago car le peintre aimait représenter des scènes de bar, de club de jazz, des paysages urbains, des scènes de rue et des portraits qui sont toujours liés à une histoire. Il a peint la réalité « vraie », celle où il n’y a ni détour, ni détails inutiles. Souvent noirs, ses modèles sont représentés dans des décors sombres où seule la lumière vient adoucir leur pauvreté et leur résignation. Sa palette a des tonalités sombres, grises, réveillées çà et là par des bleus vifs, des roses et des rouges. L’artiste terminait certains de ses tableaux avec un jus qu’il passait à différents endroits de leurs surfaces, ce qui les recouvrait d’une sorte de voile qui accentuait l’ambiance sombre de la scène. Très bon dessinateur, il réalisait des dessins très poussés avant de commencer à peindre.
L’exposition est partagée en 12 sections, chacune illustrant un thème précis et faisant appel à des références qui ont pu marquer l’artiste. Au fil des salles citons quelques œuvres comme la scène de bordel Ankara 1956 – Puis toute une série de portraits très réalistes dans la deuxième salle :
L’Amputée 1981, une peinture étrange dans laquelle on note le contraste du sujet difficile de l’amputation, avec des coloris doux de rose et de blanc. Un peu plus loin, l’Hommage à Jean Genet, 1965, une technique mixte influencée par le texte de l’écrivain : Notre-Dame des fleurs – Division Street IX 1995 – La joueuse de flûte Nikki en bleu 2001 – Anita au Victor Hôtel 1979. La dernière salle expose les vues urbaines comme Le long du canal du Nord 1979 (Chicago) et Feu rouge sur North Avenue 1980-81.
Une exposition-évènement qui permet aux visiteurs de découvrir les œuvres d’un grand peintre américain trop injustement méconnu.
Brigitte Roussey